Définition
La fable est un genre littéraire à dominance narrative qui permet à son lectorat ou son auditoire de se distraire tout en étant incité à apprendre quelque chose sur les comportements et les caractères humains. Elle présente à cet effet un court récit de fiction, allégorique, pour illustrer ou suggérer, voire mettre en discussion, une morale, un enseignement à propos d’une réalité sociopolitique ou une règle de conduite.
La morale a pour fonction d’enseigner à voir le monde tel qu’il est, de formuler une critique sociale, de conseiller des conduites prudentes... Elle est souvent sujette à interprétation et suscite la réflexion.
La fable, qui a des origines lointaines, se constitue en tant que genre littéraire avec le fabuliste grec Ésope (VIIe-VIe siècle av. J.-C.). Depuis, le genre de la fable a été repris par des auteurs/autrices dans divers contextes culturels. S’inspirant grandement d'Ésope, Jean de La Fontaine (1621-1695) a conféré au genre une dimension théâtrale et éminemment poétique, notamment en lui donnant une forme versifiée.
Les fables combinent un court récit et un constat, un énoncé, souvent appelé morale, qui contribue à la construction d'une interprétation de la fable. Parfois, le sens "moral" ainsi construit n'est pas immédiat mais consiste en la confrontation de cet énoncé et du récit, dans une perspective allégorique, permettant de faire émerger diverses interprétations du texte.
Le récit présente souvent une structure prototypique:
- l’exposition ou situation initiale campe le décor, présente les personnages, annonce le sujet…;
- le nœud mène l’action de la complication à son point culminant;
- le dénouement, ou résolution, conduit à la situation finale de l’histoire.
Les protagonistes du récit sont souvent des animaux, mais peuvent aussi être des objets, des éléments de la nature qui sont anthropomorphisés, parfois des êtres humains, ou encore des personnages mythologiques, évoquant implicitement des catégories sociales existantes. Souvent, leurs (més)aventures mettent symboliquement en confrontation les défauts et les qualités de l’âme humaine (pouvoir et faiblesse, vanité et modestie, cruauté et innocence, ruse et naïveté, etc.).
Cette "structure duelle" (Vanderdorpe, 2008) est fréquemment annoncée dans les titres des fables alliant deux personnages associés culturellement à des traits de caractère ou des comportements humains : par exemple, dans Le Lion et le Rat, le lion évoque la force et le rat la faiblesse; dans Le Corbeau et le Renard, le corbeau évoque la naïveté et le renard la ruse, etc.
Les fables, qui peuvent être écrites en prose ou en vers, présentent essentiellement des séquences textuelles narratives et dialoguées, plus rarement descriptives et/ou injonctives (notamment dans la formulation de la morale) qui s'inscrivent globalement dans une perspective argumentative de la fable.
Les
fables se prêtent facilement à des performances publiques.
Situation dans le cadre général des genres textuels
Par certaines de ses caractéristiques (structure narrative du récit, présence d'un narrateur/une narratrice, de personnages, de verbes d’action, de paroles rapportées), la fable relève des "textes qui racontent". Elle comporte aussi des caractéristiques qui la rapprochent des "textes qui argumentent" et, dans certains cas, comme chez La Fontaine, des caractéristiques (versification notamment) qui la rapprochent des "textes qui jouent avec la langue".
D’un point de vue linguistique, la fable recourt au système des temps du récit (passé simple/imparfait, parfois présent de narration), aux temps du discours dans les dialogues, au présent de vérité générale et/ou à l’impératif dans l’énonciation de la morale.
Les fables peuvent contenir des paroles rapportées: indirectement et/ou
librement dans les séquences narratives; directement dans les séquences
dialoguées. La morale peut comporter des marques énonciatives lorsque le
narrateur s'adresse à son lectorat (je, nous,
vous, on, Lecteur…).
La fable se distingue d'autres genres proches selon les paramètres ci-après.
- La fonction argumentative du récit la distingue d'autres genres narratifs tels que le conte merveilleux ou le récit d'aventure.
- La simplicité du récit, l’anthropomorphisme, l’absence de quête la distinguent du conte philosophique.
- L’anthropomorphisme la distingue de la parabole qui met en scène des personnes pour expliquer, faire comprendre des connaissances liées à un aspect religieux.
- La présence d'une morale, explicite ou implicite, la distingue du fabliau qui est un conte satirique visant à railler certaines catégories sociales (moines, paysan·nes…) de façon souvent grivoise.
N.B. Il
n'est pas toujours simple de distinguer la fable du conte, ces deux genres
partageant de nombreuses caractéristiques (texte divertissant et relativement
court, structure narrative, transmission de valeurs…). Cependant, la fable est fondamentalement
orientée vers une leçon morale, souvent explicite, qui en constitue
l'aboutissement, alors que le conte véhicule des valeurs culturelles et
sociales sans formuler explicitement une morale.
Référence citée
Vandendorpe, C. (2008). La fable. Un genre exemplaire. Québec français, (148), 65-68.